Vingt-cinq artistes partagent leurs « Surfaces sans cible »
À l’ère du smartphone, d’Instagram et des clichés qui s’auto-détruisent, quelle est la place de l’artiste dans un monde où les images sont partout ? C’est la question que se pose l’exposition “Surfaces sans cible”. Chez 22 Visconti, espace d’exposition situé dans cette petite rue de Saint-Germain-des-Prés qui a vu séjourner Racine, Balzac et Delacroix, la commissaire Anaïd Demir a invité, à l’initiative d’Armelle Leturcq, fondatrice de la revue Blocnotes et du magazine Crash, vingt-cinq artistes toutes générations confondues à présenter leurs images mentales. Des “surfaces sensibles” libres de contextes, cadres, ou cibles imposées qui donnent naissance au manifeste “Surfaces sans cibles”. Avant même de pénétrer dans la galerie, le visiteur se retrouve face au portrait de Gianni Motti placardé sur les vitres extérieures. Il s’agit là de ses posters pour la campagne électorale à la présidence des États-Unis, un happening réalisé en 1996. À l’intérieur, l’exposition se lit comme un collage en trois dimensions où les oeuvres se rencontrent et dialoguent. À l’image de “Dos Equis” de Chris Burden, petit cadre qui surplombe la photographie sculpturale de la jeune Alice Guittard. Devant “Post-image 003” de Wang Du, un modelage représentant une foule compacte de photographes devant le derrière d’une dame accroupie, la jeune Araks Sahakyan livre une série de performances utilisant son dos nu comme l’écran de projection d’une série de photographies d’enfance en Arménie. Un travail qui résonne avec ses images mouvantes exposées sur les murs de la galerie, non loin des “Panoramic Obsessions” de Frank Perrin. Si la technologie et les réseaux ont démocratisé outre-mesure la pratique photographique, Marie Maillard en fait le vecteur de sa vision : exposée au sol, son œuvre “UNIT 1512” ne peut se lire entièrement que lorsque regardée à travers un smartphone ou une tablette. Ainsi lorsque l’envie vient au visiteur de dégainer son smartphone pour capturer, partager ces instants, la question se pose : n’est-ce pas là voler aux “surfaces sans cible” leur vocation première ? À méditer jusqu’au 19 novembre.