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10.09.2015 #design

Clémentine Larroumet

Be-Pôles sur tous les fronts

Quand on créé une marque, on créé ça comme le socle d’un bâtiment : dix ans après il faut qu’il ait gardé tout son sens.

Concentré de création en plein coeur de Paris (les bureaux offrent une vue imprenable sur le Centre Pompidou), Be-Pôles et ses deux associés, Antoine Ricardou et Clémentine Larroumet, est certainement à l’origine de ce qui se fait de mieux en termes d’identités visuelles ces dernières années. Les locaux de Merci, les sacs en kraft brun, mais surtout les très jolis carnets «Portraits de villes» : on les leur doit. C’est donc à l’occasion de la sortie du dernier portrait de ville en date (Madrid) que nous sommes partis à la rencontre de Clémentine, moitié de ce duo résolument graphique. Présentations.

Racontez nous l’histoire de la création de Be-Pôles. Comment l’aventure a-t-elle commencé ?

Be-Pôles, c’est d’abord Antoine Ricardou, architecte de formation qui a monté son studio après avoir vécu quelque temps en Australie. Moi je viens du milieu de l’édition, c’est d’ailleurs essentiellement ce dont je m’occupe ici. L’architecture et l’édition font bon ménage! Ensemble, on s’est très vite orientés vers la création et la refonte de marques. On a d’abord travaillé avec Mille et une listes, puis pour la Médiathèque musicale Mahler, pour Pierre Bergé… Nos projets sont très complets.

Vous partagez vos studios entre Paris et NYC. Qu’est-ce qui change dans votre métier entre ces deux villes aux cultures transversales ?

On a fondé un studio à New York en 2007, au moment où on a lancé l’identité de Merci. La différence vient de la culture et du graphisme en soi. Aux Etats-Unis, ils sont très typo, avec une vraie culture issue de la rue. Ici, ça va être un peu plus poussé, plus culturel. Les inspirations sont différentes, donc on vient se nourrir un peu les uns les autres. On fait aussi voyager les gens, ce qui donne une bonne dynamique.

Existe-t-il des ponts entre l’identité visuelle et les arts ?

L’identité visuelle, c’est le socle de la marque. On ne peut pas jouer avec, c’est vraiment un identifiant très fort. Quand on créé une marque, on créé ça comme le socle d’un bâtiment : dix ans après il faut qu’il ait gardé tout son sens. Le pont se fait donc plus avec l’architecture qu’avec l’art même.

A Paris, comment votre métier créatif est-il perçu ? Le réseau joue-t-il un rôle dans votre succès ?

Notre succès est venu de manière assez naturelle, ce qui est une chance. On a très vite eu des projets par bouche à oreille, dans des milieux qui étaient effectivement proches de ce qu’on recherchait, notamment la culture. On a eu un bouche à oreille de clients satisfaits qui nous ont renvoyés vers d’autres projets… De notre côté, on aime créer des familles, faire en sortes que certaines personnes se connectent entre elles. On travaille avec une certaine générosité. Nos clients deviennent très vite de bons amis, c’est très «friends and family». Tout cela fait qu’on se construit petit à petit un réseau qui nous renforce.

Quel est l’ADN de vos «Portraits de villes» ?

«Portraits de villes», ce sont là encore, de très jolies rencontres. On a laissé carte blanche à quatre photographes qu’on aimait beaucoup : Vincent Mercier avec qui on travaillait beaucoup et qui a fait Los Angeles, Vanessa Atlan, photographe plasticienne qui a fait Naples, Pierre Ricardou qui a fait Rome et Fred Lebain, qu’on a démarché. L’idée était de repenser le livre de photo en sortant des sentiers battus, en faisant quelque chose de plus intime, très proche de l’ADN de Be-Pôles. Le papier compte beaucoup, il y a des vrais choix de matière, sans répondre aux codes du luxe des livres de photographie traditionnels comme on peut se les imaginer. On recherchait l’intime, ce qu’on aime, quand on voyage nous-même. On en sort désormais quatre par an.

Harry Gruyaert, Artus de Lavilléon… Vous avez visiblement collaboré avec de grands noms de la photographie ou du dessin pour ces portraits. Comment choisissez-vous vos collaborateurs ?

On a vraiment de très beaux noms. Nous avons rencontré Harry parce qu’il avait acheté le livre de Philippe Chancel dans une galerie qui nous exposait au moment des sorties des ouvrages pendant plusieurs années. Philippe Chancel a fait Dubai et ses photos ont été exposées à Beaubourg. Massimo Vitali avait des amis ici , on a donc dîné avec lui et il nous a dit oui tout de suite. La facilité à éditer des photographes géniaux comme ça est assez déconcertante! On s’est aussi créé tout un réseau de lieux très jolis qui accueillent la collection et qui les vendent bien.

En voyage, vous êtes du genre «unplug» ou Instagram à tout va ?

Instagram, je m’y suis mis il n’y a pas si longtemps donc je suis pas mal dessus en ce moment. J’aime aussi bien dessiner, et instagramer mes dessins. Je me nourris au quotidien de belles images, de belles compositions. Mais parfois c’est bon de couper!

Surveillez-vous votre e-réputation ?

Oui, je trouve qu’il faut savoir maîtriser ce média qui accapare beaucoup. Je crois qu’il faut aussi se nourrir ailleurs, parce que si on s’observe trop, ça peut devenir un peu dingue. C’est super de s’enrichir des inspirations des autres mais c’est bien aussi de s’arrêter, sinon, on fatigue.

Quand on est globe-trotteur ET parisien, l’anecdote de voyage est-elle une arme pour briller dans les diners ?

Je ne sais pas si ce que j’aime faire c’est briller dans les dîners… Donc briller, non, mais rigoler, assurément.

Propos recueillis par Sabina Socol.
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