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20.10.2010 #art

Bruno Hadjaj

Bruno, c’est un peu Shiva fait homme. Communément, pour sa capacité à faire mille choses en même temps. Mais surtout, comme le dieu hindou, pour son troisième œil, celui de la création. A l’heure de Cutlog, il nous fait entrevoir son univers.

Vous lancez la deuxième édition de Cutlog cette semaine, d’où vous est venue l’idée de ce nouveau Off ? Quelle est votre motivation ?

Quand on voit Bâle ou Miami, on se demande comment des villes avec aussi peu d’intérêt culturel peuvent abriter des foires d’art contemporain aussi importantes, alors que Paris, qui a une tradition d’accueil d’artistes, n’a pas la même place. Il y a plus de vaches que de musées à Bâle ! Lancer cette foire était donc un acte de citoyenneté envers ma ville, avant tout. Slick et Show Off ont fait un premier travail, j’entends que Cutlog continue et contribue à faire de Paris la ville n°1 de l’art contemporain.

D’où vient ce nom, Cutlog ?

On a cherché pendant deux mois, et il est né d’un cadavre exquis. C’est l’association de plusieurs noms. On entend culte, cut, logger, etc. Il y a différentes significations et il sonne dans toutes les langues. Cela nous a plu.

Quel est le positionnement de Cutlog ? Comment pensez vous vous différencier des autres foires ?

Je suis un artiste au départ. Pour moi, chaque foire a sa couleur. Notre axe, c’est l’émergence, la découverte. A Bâle cette année, j’ai demandé à un autre directeur de foire s’il avait vu des artistes intéressants et il m’a répondu qu’il avait vu des galeries intéressantes. Ce glissement est important. Pour nous, la qualité des œuvres compte autant que celle des 35 galeries que nous présentons cette année. Au-delà de cela, notre différenciation se fait aussi, je crois, sur la qualité d’offres de services, au travers de nos partenaires, notamment. Nous ne faisons pas appel à des médiateurs, mais à des concierges, autrement dit, des pros du « welcome ». Puis, sûrement parce que je viens du cinéma, j’attache de l’importance à la scénographie du lieu.

Quel est votre coup de cœur de la foire, cette année ?

Je ne saurais vous dire. Je constate cela dit, la confirmation du retour à la figuration, à la peinture. L’école des années 1980 inspire beaucoup de jeunes artistes en Europe. Par ailleurs, je me félicite du décloisonnement entre peinture et photographie. Les galeries n’hésitent plus à mettre en avant les deux, au lieu de se spécialiser.

Quelle direction voulez-vous lui donner dans les prochaines années ?

Je souhaite, en plus de la foire, développer des projets avec les galeries dans un cadre un peu plus pérenne, à l’année. Je souhaite aussi approfondir les cycles de conférence car, pour moi, la foire n’est pas qu’un lieu de business. Cela doit être un lieu de réflexion aussi. La fonction consulting, ou comment apprendre aux institutions et aux particuliers à acheter de l’art contemporain, me semble essentielle aussi.

On vous connaît essentiellement comme chef déco pour la pub et le cinéma. Mais, en plus de cette foire, vous êtes également à la tête de la boutique mode Spree et d’une nouvelle galerie d’art et de design, Papiers Peints. Quel est, selon vous, l’axe directeur de toutes ces activités ?

L’axe, c’est la direction artistique, la découverte. J’aime réinventer des formes de business devenues obsolètes. En fait, l’axe c’est la recherche.

Comment vous partagez-vous la D.A. de tout cela avec votre femme ? Comment faites-vous pour tout faire en même temps ?

On se lève à 6h et on se couche à 1h du matin ! Ma femme s’occupe du choix des créateurs de mode, moi des designers. Pour les artistes contemporains, on le fait ensemble. Mais, on se consulte en permanence sur tout…

D’où est née votre passion pour le design ?

Au départ, j’ai un CAP de tapissier. J’ai grandi sur une table de coupe, avec des meubles du XVIIIème et du XIXème siècles. Par la suite, en tant que chef déco, en faisant des recherches pour des films, j’ai approfondi cette passion. Aujourd’hui, j’aime les meubles des années 1950/1960. Jusqu’aux années 1980, mais pas après.

Parlez nous de Papiers Peints.

Nous avons ouvert cette galerie de design et d’art contemporain, en face de Spree, rue de la Vieuville, cet été. Mais l’ouverture officielle aura lieu en novembre, pendant le mois de la photo. Nous inaugurons avec le photographe néo-zélandais Harvey Berge, qui nous suit depuis longtemps. En effet, chez Spree on avait déjà l’habitude d’inviter des artistes comme Harvey pour des installations, mais cela restait des one shots. On a eu envie de faire mieux. Et puis, la façade Le Corbusier de Papiers Peints est sublime !

Pourquoi avoir choisi de vous implanter dans le 18ème, quand ce coin de la capitale n’était pas encore envahi par les bobos ? Quel est votre rapport à ce quartier, à Paris ?

Bizarrement peut-être, ce quartier offre une vraie liberté artistique. On peut proposer beaucoup de choses, faire tout ce qu’on veut en matière de display ; Rive gauche, c’est plus compliqué. Spree existe depuis presque dix ans, nous habitons dans le 18ème depuis cinq ans…Tout ce que j’espère, c’est qu’il y ait plus d’artistes et de galeries qui s’implantent dans le coin. Le quartier a un potentiel énorme car il y a un vrai passage et un vrai intérêt par ici. Tout le monde vient !

Propos recueillis par Florence Valencourt

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