Jun Inoue
VISION GATE – « Hitoshobu (OneShot) »
Les panneaux publicitaires dans les aéroports jouent un rôle très important dans l’impression que l’on se fait d’un pays.
Dans un contexte mondial où la découverte de nouvelles cultures est mise à mal, l’Agence pour les Affaires culturelles, rattachée au gouvernement japonais, vient de lancer une initiative visant à promouvoir la culture, à la fois unique et plurielle, de son pays. Nommé CULTURE GATE to JAPAN, le projet se compose notamment d’une série d’expositions organisées dans sept aéroports du pays. Les aéroports internationaux de Tokyo Haneda et Narita accueillent ainsi VISION GATE, un group show réunissant huit artistes japonais toutes générations confondues sur une proposition curatoriale de Paola Antonelli, conservatrice principale du département d’architecture et de design du MoMA de New York. Alors que Yuri Suzuki et Miyu Hosoi présentent une installation sonore nommée « Crowd Cloud », six artistes présentent leur vision d’un Japon entre tradition et technologie, passé et présent, dans une série de vidéos réparties dans les différents terminaux d’arrivée de l’aéroport. acky bright, Jun Inoue, Mariko Mori, Monika Mogi, PARTY et Sachiko Kodama transmettent ainsi leur interprétation singulière de leur culture natale aux voyageurs qui posent le pied, peut-être pour la première fois, sur le sol japonais…
Que vous évoque la notion de « vision » en tant qu’artiste ?
Certains événements transforment complètement notre vision du monde. Les panneaux et visuels publicitaires dans les aéroports jouent un rôle très important dans l’impression que l’on se fait d’un pays. J’ai voulu que mon travail, en l’occurence cette vidéo, stimule les sens de la personne qui la regarde et étende son champ de vision, tout en enrichissant son expérience du Japon.
Quelle place tiennent vos racines japonaises dans votre travail, ainsi que la tension entre passé et présent, tradition et innovation dans la culture japonaise ?
Sur fond de musique hip-hop, l’œuvre créée dans cette vidéo est née de matériaux issus d’Europe et des États-Unis, mais la méditation qui précède la création et l’expressivité en marge de l’œuvre elle-même son reflétées dans mon travail grâce à l’influence de la pensée bouddhiste et de l’esthétique japonaise. Je pense aussi que la personnalité des Japonais, et leur capacité à transformer leur héritage en des propositions nouvelles, a une grande influence sur mon travail.
Pouvez-vous nous parler de votre œuvre présentée dans le cadre de VISION GATE, et la différence qu’il y a pour un artiste à exposer dans un aéroport au lieu d’une galerie ?
Je crée principalement des œuvres à plat, des muraux, je fais parfois de la peinture en direct. Or pour ce project, la vidéo devient l’œuvre. J’ai travaillé avec le vidéaste Naoto Sakamoto sur le thème du motif que je voulais dessiner. En montrant le processus de création de l’œuvre par le biais de la video, j’étais conscient d’y intégrer une dimension « live » que l’on a perdue à cause de la pandémie. Regarder un corps en mouvement, ses expressions liées à la performance, au jeu, à la compétition est l’un des stimuli essentiels à la créativité. Ce n’est pas quelque chose dont on peut faire l’expérience à cause de la réalité physique de l’exposition, mais si je peux être capable de stimuler ne serait-ce qu’un peu les sens du public, alors pour moi l’œuvre n’aura pas été vaine.