MAI LAN
Dimanche soir, l’étoile montante de la pop française RocKait à La Cigale. Saywho l’a rencontrée avant sa montée sur scène, pour parler le coup. Tout semble « easy » pour elle: la mode, le cinéma, la musique aujourd’hui. Rencontre avec MAI LAN, la petite voix frêle du clan Chapiron.
On a certainement dû te poser des milliers de fois cette question mais on te la pose quand même : ça signifie quoi littéralement « MAI LAN» ? On a googlisé ton nom et on a trouvé « Fleur d’abricot et Orchidée ».
Tout à fait, la fleur d’abricot c’est une fleur en fait.
C’est joli mais « Thanh Mai » (« fleur d’abricot vert » en vietnamien ndlr) serait peut-être plus adapté à ta personnalité délicate et transversale, non ?
[Elle réfléchit]. Ca me plaît [Rires].
C’est ton frère (le réalisateur Kim Chapiron ndlr) qui t’aurait poussé à te lancer dans la voie du 4ème art. Des après-midi entiers de rap des années 90. Pure torture d’avoir enduré ces sonorités ou pas?
[Rires]. Non, non, j’étais totalement consentante. Ce n’était pas du tout une torture. C’est vrai que Kim a beaucoup participé à ça, au fait que je sorte un album aujourd’hui, que je pousse le projet musical plus loin. Il a toujours beaucoup cru en moi là-dedans et il a toujours su que c’était ça mon truc.
Au final donc, son emprise fraternelle paye.Tu sors un super opus pop, plein d’amour et de fraicheur folk – qui disons-le – part dans tous les sens, et on adore. A l’écoute de ton album, on a la « pêche » et on sourit volontiers à sa forme indéterminée et smart. Tu te rappelles du moment où tu t’es lancée, la peur au ventre ? Elle existe toujours cette peur ?
Toujours énormément d’appréhensions, c’est sûr ! En fait j’adore chanter depuis que je suis tout enfant mais j’ai toujours senti que j’avais une petite voix un tout petit peu frêle et que je ne pouvais pas envoyer du coffre etc. Donc je me suis toujours sentie un petit peu… « pas technicienne » et donc pas légitime presque. Mais ça n’a rien à voir en fin de compte. Aujourd’hui, j’ai encore très peur quand c’est l’heure de monter sur scène, que ma voix tire beaucoup. Je ne sais pas encore très bien gérer ça, mais voilà j’apprends et je suis trop contente d’apprendre parce que plus je travaille, plus j’essaye des trucs nouveaux et plus je me rends compte que le panel des choses possibles à faire est très très large. Au début je ne me mouillais pas trop, je faisais des petites chansonnettes mais c’est en essayant que j’ai découvert que je pouvais rapper, crier, faire des chœurs de ouf, que je mettais beaucoup d’intentions etc.
Elle communique comment la fratrie Chapiron au quotidien? Plutôt à coups de « je t’aime » ou plutôt à coups de « je t’emmerde »?
Dans ma famille il y a beaucoup d’amour. Que des « je t’aime », que des « je suis trop fièr(e) »… Et puis quand il y a des choses à dire, on n’a pas peur de se les dire non plus.
Tu connais Diane Pernet ? L’icône de mode vêtue de noire avec une mantille espagnole, et des lunettes en forme d’yeux de chat. Dimanche soir, c’était la clôture de son festival ASVOFF à Beaubourg. Tu te verrais passer derrière la caméra et réaliser des films comme ton frère, avec Max Schumacher (ami d’enfance et guitariste de MAI LAN ndlr) en tête d’affiche ?
Pas vraiment non. Ca m’impressionne beaucoup. Je connais bien parce que j’ai beaucoup de gens autour de moi qui le font et c’est vraiment un boulot de longue haleine où il faut être extrêmement patient, avoir tout dans la tête, pouvoir diriger tout le monde etc.
Quel est le morceau préféré de ton album?
Ca dépend de mon humeur, et du moment… J’écoute moins l’album depuis quelques temps. J’aime assez bien « Le Dahut » en fait. Ca part vraiment en gros truc à la fin, en canon avec toutes les voix… C’est assez agréable et communicatif.
Et ça ressemble à quoi un « dahu »? Tu nous en dessines un ?
Ouais, bien sûr ! Ce sera un dahu « in the wood at night » (cf. le dessin dans la galerie photo). Il a l’air méchant mais ce n’est vraiment pas sûr qu’il ressemble à ça. Il paraît qu’il a des pattes plus courtes que les autres et du coup ça rend sa démarche un peu bancale.
C’est un animal imaginaire ou bien réel ?
C’est un animal imaginaire et avec Max, on allait le chasser quand on était petit. Donc soit il peut être un petit peu flippant comme ça, comme je l’ai dessiné. Je l’ai toujours perçu tel quel parce que ça me faisait flipper petite… Soit il peut être un peu débile. Donc c’est un animal imaginaire « flippant-débile ».
Tu montes « on stage » dans 3 petites heures. Elles ressemblent à quoi tes 5 dernières minutes avant de monter sur scène? T’es plutôt bavarde, traqueuse… ?
Je ne parle avec personne, et en général ceux qui essayent de me parler n’obtiennent pas de réponses. Je fais des petits exercices de dernières minutes, les petits exercices du désespoir [Rires], genre « allez on verra bien ». Et puis je me prends un petit verre de vodka mais je n’ai pas encore pris le bon coup au niveau de la mesure. Parfois c’est un petit peu trop, parfois c’est un petit peu pas assez… Et les rares fois où c’était pile poil, c’était parfait!
Ton coup de cœur inRocKs 2012, c’est qui ?
J’ai passé une semaine de dingue en Suisse, pleins de concerts donc je n’ai pas trop suivi… Je suis assez curieuse de voir Benjamin Biolay ce soir. Je pense que ça va me plaire. J’ai entendu un petit peu en balances et ça avait l’air d’être joli… Hot Chip, j’ai cru entendre que c’était mortel… ALT-J j’aime beaucoup aussi !
Et ton coup de cœur hors inRocks du moment ?
Je suis assez fan de Ibrahim Maalouf, un trompettiste que j’ai découvert il y a peu de temps. Je crois qu’il n’aime pas qu’on dise qu’il fait du jazz donc il ne fait pas de jazz mais c’est très très beau. Ca me touche énormément.
Tu nous « set the scene » de ta collab de rêve? Tout type d’artistes confondus – qu’ils soient « dead or alive ».
En mort je dirais Jacques Brel, mais en même temps je ne sais pas si j’aurais été à la hauteur… Sinon j’aime bien Hussein Chalayan. On serait dans un musée, je chanterais et lui aurait crée une robe pour moi qui fait des lumières, qui se tourne et puis qui se transforme en je ne sais quoi [Rires].
Il nous reste 5 mins. On joue au Bop it (jeu américain délirant ndlr)?
[Rires]. Jouer au Bop it ? Fallait me dire, je n’ai pas le mien sur moi ! J’adore ce jeu, en plus je suis en recherche de partenaires… Mais en même temps c’est toujours un peu nul de jouer avec les débutants [Rires].
Dommage. Parle-nous de «jubilo», ton ami dans ton clip « Easy » alors.
C’est le menton de Dalila, ma meilleure amie. Elle a un jubilo très très mignon et en plus elle est hyper forte. Elle est danseuse professionnelle et du coup elle peut tenir des poses complexes, se casser en deux pour jouer au jubilo… Et puis le sien est très actif [Rires]. C’est un jeu auquel on joue depuis qu’on est tout petit. C’est mon jeu favori en fait.
Propos recueillis par Alexandra S. Jupillat
Photographe : Jean Picon