Samuel Drira
Entre Paris et Prague
J’aurais pu faire un magazine en essayant d’avoir une star en couverture, mais je préfère parler de gens qui m’ont inspiré.
Alors que Paris vit déjà au rythme des défilés, Samuel Drira, créateur d’Encens Magazine et directeur artistique de Nehera Prague nous parle des rencontres qui ont marqué son parcours et de ses coups de coeur jeunes créateurs. Présentation.
Votre parcours en quelques dates ?
J’ai toujours voulu faire de la mode. J’ai fait des études universitaires puis j’ai travaillé dans l’édition. J’avais 27 ans quand j’ai compris que je voulais vraiment travailler dans la mode. J’ai commencé grâce à mon magazine, Encens. Des designers m’ont contacté, ils sont devenus des amis et nous avons travaillé ensemble. Ils montaient une marque, il a fallu les aider à construire leur univers et leur philosophie.
Quel est le lien entre Encens Magazine et Nehera Prague, vos deux créations ?
J’ai monté Encens il y a 12 ans parce que je souhaitais faire du livre de mode. C’est vite devenu un magazine à la première personne du singulier, où je montrais mon idée d’une collection. Ce n’est pas étranger à Nehera, puisqu’au fond la manière de faire est la même : il doit y avoir une direction qui soit cohérente de saison en saison. C’est un peu la même chose, sauf qu’à la fin on a des vêtements ou une impression sur du papier.
Pourquoi Prague et non Paris? C’est assez inhabituel dans la mode…
Le showroom de la maison est à Prague et le studio est à Bratislava. De mon côté, j’ai aussi un studio à Paris.
Qu’y a-t-il à Prague qu’il n’y a pas à Paris ?
Être à Prague, c’est fermer la porte. C’est une ville très calme, très belle, mais c’est comme aller à la campagne. Il y a ce côté qu’on retrouve un peu dans Nehera, des gens qui sont dans un état d’entre-deux.
L’activité du magazine vous a permis de vous créer un réseau créatif solide entre vous contributeurs et les autres rencontres. Pouvez-vous nous parler de votre garde rapprochée ?
Je construis des rapports de famille avec les gens. J’aurais pu faire un magazine en essayant d’avoir une star en couverture, mais je préfère parler de gens qui m’ont inspiré. J’aime bien découvrir, et les choses qui se construisent sur le long-terme. J’adore travailler avec Alba Pistolesi par exemple, elle était sculpteur avant d’être mannequin et que Phoebe Philo se l’accapare. Dans le prochain numéro on a Anna Cleveland (la fille de Pat Cleveland), qu’on voit beaucoup en ce moment…
Ce même réseau vous aide-t-il pour le déploiement de votre marque ?
C’est plus facile quand on cherche un photographe, oui! Disons que faire connaissance, c’est déjà fait.
Quelle est la rencontre qui a marqué votre parcours ?
J’admire énormément l’artiste Serge Lutens. Je l’ai rencontré l’année dernière, et je crois que s’il m’avait demandé de passer le balais chez lui, j’aurais tout arrêté et je l’aurais fait ! Sa personnalité, ses choix artistiques, sa manière d’appréhender les difficultés en gardant de la légèreté… Je trouve ça admirable.
Un coup de coeur jeune créateur ?
J’adore l’énergie de Jacquemus. Il a une énergie complètement inconsciente, innocente, qu’on ne peut avoir qu’à son âge. C’est tellement bien d’avoir quelqu’un comme lui à Paris. Ca fait trop longtemps qu’on a la tête dans les chiffres, et ça ne donne que des choses ennuyeuses. Jacquemus, c’est direct et frais. J’espère qu’il restera comme ça.
Propos recueillis par Sabina Socol / Photos : Virgile Guinard
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